La Syrie : une question de religion ou de pouvoir? Par Guillaume FREIRE

Il nous semble presque usuel d’apprendre qu’il y a un nouvel attentat, un nouveau coup d’État dans les pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Pouvons-nous affirmer pour autant que l’Islam y est pour quelque chose? Est-ce plutôt une culture de la guerre qui est présente? Et si nous essayions de voir tout cela avec une autre perspective : et si le problème venait de l’extérieur?

Comme le croit les historiens, il est impossible de comprendre une situation en ne regardant uniquement le moment où le conflit éclate. Il ne faut pas non plus regarder ce qui s’est passé les semaines avant. Il faut observer l’Histoire.

Premièrement, toute la région a déjà été sous possession ottomane jusqu’à sa chute, à cause de la Première guerre mondiale. Ensuite, ce fut les mandats de la SDN qui décidèrent quel pays allait s’occuper de «gérer» les anciennes provinces de l’Empire. Comme vous pouvez le voir, la région ne fit que passer d’un impérialisme à l’autre. À la suite de la décolonisation, les pays du Moyen-Orient commencèrent à avoir des gouvernements nationalistes au pouvoir; principalement des anciens généraux, comme Nasser en Égypte et Hafez Al-Asad en Syrie. Ces États faisaient pied de nez aux Américains de deux façons : en ne leur permettant pas de contrôler la région, ainsi qu’en optant pour des politiques «socialisantes». Le but était de rehausser le niveau de vie et de développement de la population, mais dans la logique de la guerre froide, on s’entend que les Américains n’étaient pas les plus emballés!

Et nous arrivons à ce qui s’est passé durant les révolutions dans le monde arabe : plusieurs dictateurs, présents depuis les années 70, perdent le pouvoir. Pourquoi le gouvernement syrien, avec Bachar Al-Asad, fils de Hafez, tient-il toujours?

Ce conflit n’est pas un combat religieux. Ce n’est pas pour faire tomber un dictateur. Sinon, les États-Unis pourraient aussi bien s’attaquer à l’Arabie Saoudite (qui appuie fortement les rebelles, il faut le souligner).

Ce n’est pas non plus pour empêcher l’utilisation d’armes chimiques. Ces armes ne servent qu’à dissuader les attaques extérieures, à défaut de posséder l’arme nucléaire. De toute façon, il est très dur de savoir qui les a utilisées. Les autorités américaines affirment qu’Assad en est le responsable, alors que les autorités russes blâment les rebelles. Le mandat de l’ONU se limitait à prouver l’existence d’armes chimiques en Syrie, et non d’identifier les responsables de leur utilisation contre la population civile. Cependant, une question se pose: pourquoi l’armée syrienne utiliserait-elle ce type d’arme contre sa population, alors qu’il a l’avantage dans cette lutte contre l’insurrection?

Alors, pourquoi intervenir en Syrie? Nous avons, présentement, au Moyen-Orient, une majeure partie des gouvernements alliés à l’Occident, et peu leur font une opposition politique, à part l’Iran et la Syrie. Toutefois, la force militaire syrienne est considérable dans la mesure où, depuis son indépendance, elle a alimenté sa puissance militaire et son système de défense national. Ainsi, dans le cas où son gouvernement tomberait, les groupes rebelles ne pourraient avoir une mainmise assez solide sur le pays. De plus, la Russie ne peut permettre ça, surtout pas dans sa cour arrière, chez un de ses alliés importants de la région.

Le conflit en Syrie est un drame humain à grande échelle; le conflit perdure depuis trop longtemps, avec son lot de perte humaine et matérielle. Le gouvernement a certes du sang sur les mains, tout comme les forces rebelles. Cependant, il ne faut pas oublier que tous les pays ayant fourni de l’aide à chacun des camps se sont aussi salis. Rappelons-nous l’Irak, rappelons-nous tous les conflits de la région comme l’Afghanistan: les interventions extérieures aident rarement la fin d’un conflit. Armer un camp pour organiser un putsch ou bombarder la capitale ne réglera rien dans le cas présent.

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