Moment politique au Sommet sur l’éducation supérieure

Par Olivier Jacques Quels gains les étudiants peuvent-ils obtenir? Malgré les critiques à son endroit, le Sommet sur l’éducation supérieure est un moment politique où une fenêtre d’opportunité s’ouvre pour régler la question des frais de scolarité au Québec une … Lire la suite

Mascarade au sommet

Par Gabriel Clermont

Le temps d’espérer est terminé. Lors du printemps dernier, nous, étudiant-es, désirions une réflexion collective sur les fondements de notre enseignement supérieur.  Dès lors, les États généraux promis par le Parti Québécois figuraient au titre d’avenue potentielle. Fort malheureusement, notre espérance a vite cédé le pas à la désillusion. L’exercice démocratique et consultatif tant louangé par cette formation s’en avère un de relations publiques. Déclinons.

Narquoisement« Narquoisement » – Annonce du sommet sur l’éducation – 8 novembre 2012 – Pascal Dumont (Quartier Libre)

D’entrée de jeu, il est impératif de rappeler que le Parti Québécois n’est en rien l’allié naturel des étudiant-es. Outre l’hypocrisie d’afficher le carré rouge tout en prônant l’indexation des frais de scolarité, la trajectoire historique empruntée par cette formation souverainiste sur la question abonde d’exemples. À ce chapitre, certains se souviendront que le Parti Québécois a auparavant tenté d’hausser les frais de scolarité de 30% en 1996. La pertinence de cet exemple s’explique entre autres par le fait que cette décision fut la résultante du Sommet socio-économique de la même année. Désastreux pour la classe moyenne, celui-ci se solde par une amputation de 1,9 milliards (!) du budget de l’éducation supérieure. Dès lors, un sentiment de colère secoue le monde l’enseignement supérieur, obligeant Pauline Marois, actuelle Première ministre, à rebrousser chemin. Peu de temps s’écoule avant qu’un nouvel acte de trahison se produise. En l’an 2000, les bases sont jetées pour entamer un nouveau processus de consultation publique. S’intitulant le Sommet du Québec et de la jeunesse, les acteurs présents s’entendent pour instaurer des contrats de performance entre les universités. Proposition s’assimilant aisément au concept de marchandisation du savoir.

Les derniers gestes commis par cette formation n’annoncent rien de prometteur. Les compressions de 140 millions au niveau de l’enseignement supérieur à l’aube du début des consultations, sans un quelconque préavis, sont une preuve supplémentaire de mauvaise foi. Quant au  respect de ses promesses électorales, le recul du Parti Québécois sur la taxe santé et l’augmentation des tarifs d’électricité démontrent que sous cette illusion de progressisme, un fort courant libéral habite l’exécutif de ce parti. Promettant un renouveau politique, les derniers actes font croire que le gouvernement ne se livre qu’à une stricte gouvernance de l’État québécois. L’application de principes managériaux à la gestion du bien commun ne fait que perpétuer la perte de confiance des citoyen-nes à l’égard des institutions publiques. Se proclamant de l’unité et du consensus, le ministre Duchesne craint tant les écueils sur son passage qu’il fabule à pouvoir rassembler des groupes aux positions antipodes, tels que l’ASSÉ et le Conseil du Patronat. À la lumière des thèmes abordés, il est triste de constater que la question de la vocation de nos universités semble avoir été évacuée. Dès lors, comment pouvoir prétendre refonder leur mission sans s’interroger sur cet aspect fondamental ? Sur le point précis de la gratuité scolaire, aucun espoir n’est à entretenir. Assurément, cette idée fait figure de marginale au sein de la superstructure actuelle. Au final, la formule privilégiée par le ministre diverge de celle proposée au printemps dernier. Promettant un espace de discussion et de réflexion ouvert au plus fort de la crise, la situation actuelle seconde la thèse accusant le Parti Québécois d’amateurisme par volonté de capital politique.

À la lumière de ce constat, nous ne pouvons qu’adresser des fleurs aux libéraux. En effet, ceux-ci possédaient au moins le mérite d’être transparent sur cet enjeu. Il y a fort à parier qu’une décision finale n’émergera pas des suites du sommet. Dans un contexte minoritaire, la proposition d’indexer les frais de scolarité fait figure de compromis auprès des autres partis lors du vote sur le budget. De plus, le Parti Québécois aura le beau jeu de déconstruire l’argumentaire de ses adversaires en affirmant que sa position relève du gel. Quant aux étudiant-es, quelle stratégie adopter ? Refusons la servitude volontaire. L’édification d’un rapport de force grâce à une mobilisation constante, dans l’optique de s’attribuer le titre de veto players, s’impose. Ne nous laissons pas mystifier par les manœuvres mesquines du Parti Québécois; ils sont passés maîtres dans l’art.

Et la reconnaissance du droit de grève ?

Avant-même le début des rencontres préparatoires, la reconnaissance du droit de grève avait suscité plusieurs remous sur la scène politique québécoise. Entrouvrant la porte brièvement à la reconnaissance légale en novembre, il semble que le ministre Duchesne ait esquivé la question à l’approche du sommet. Pour autant, considérant la résurgence fréquente des grèves étudiantes, se pencher sur la question me semble essentiel.

De prime abord, la reconnaissance du droit de grève aux étudiant-es nous assujettirait aux assauts de l’État et de son corps juridique. Nous sommes en droit de nous questionner à savoir si nos associations possèdent la capacité de faire face aux requêtes des tribunaux. À ce sujet, l’exemple de la judiciarisation du conflit étudiant nous permet d’en douter. Nouvel effet pervers, la reconnaissance du droit de grève engendrerait un changement de conception, quittant le champ de la légitimité morale pour celui de la légitimité juridique. De plus, une telle réalité réduirait le répertoire d’actions disponibles pour tout mouvement éventuel. Bref, l’énergie doit être investie à défendre la légitimité et non la légalité de la grève.

Ultimement, un déclin de la participation est à appréhender. Les étudiant-es ne se sentant plus investi-es d’une responsabilité, dues aux mesures empêchant les briseurs de grève, l’absence de ligne de piquetage risque d’entraîner une démobilisation estudiantine. Bien que cet exercice fut banalisé lors du printemps dernier, la levée des cours et le piquetage revêt une importance fondamentale, permettant d’entrevoir un changement d’échelle. Les vertus de cette action ne sont plus à évaluer. Tout en favorisant l’intégration de nouveaux-elles militant-es, celle-ci permet d’ordonner l’action collective.